Aujourd’hui je suis en colère ! Écœurée, révoltée et triste à la fois !Il n’est pas simple de partir à l’autre bout du monde et de quitter sa zone de confort pour vivre son rêve de voyage. Mais pour donner encore plus de sens à leur projet, certains décident de donner de leur temps en étant volontaire ! Et je fais partie de ceux-ci !Après avoir vu le reportage d’Envoyé Spécial sur le « volontourisme », diffusé le jeudi 02 mars 2017, je me sens salie, trahie, humiliée !!! Car oui, j’ai été volontaire chez Fresh Népal ! Et j’avoue que ce que j’ai vécu là-bas ne correspond en rien avec ce qui est relaté dans ce reportage !Je suis tout à fait consciente que « les volontaires » sont aujourd’hui une manne financière menant à des dérives que le reportage souhaite dénoncer ; mais il ne faut pas faire d’amalgames entre les différentes expériences relatées et je pense sincèrement que l’exemple de Fresh Népal est mal choisi.Je ne connais pas suffisamment le passé de Fresh Népal pour juger de toutes les informations diffusées au cours du reportage, je ne fais ici que relater ma propre expérience et vous transmettre mon ressenti du moment. Sachez quand même, qu’étant toujours au Népal, je me suis permise de retourner à Fresh Népal et de vérifier certaines informations divulguées dans ce reportage.1 – Le premier contact avec Fresh Népal :Pour ma part, je n’ai pas trouvé Fresh Népal sur la toile mais c’est mon agence de trekking qui me l’a recommandée. Je précise que cette dernière n’organise pas de « volontourisme » mais juste des treks et qu’elle m’a conseillé Fresh Népal d’après les retours positifs qu’elle en avait eu par un ancien volontaire.J’ai alors pris contact avec Fresh Népal par mail. Dev, le président, m’a demandé mes différentes expériences auprès des enfants et mes axes de compétences (sport…).Il peut paraître dingue d’être « recruté » de la sorte, mais en même temps, le volontaire n’est pas censé être en autonomie avec les enfants. Il est là pour apporter une aide ponctuelle.Alors en plus, quand j’entends dire dans ce reportage qu’on n’emploie pas de gens non qualifiés en France pour s’occuper d’enfants, j’ai franchement envie de dire à cette petite dame : « Tu rigoles ?! Je suis responsable d’un service Enfance-Jeunesse et je sais très bien qu’on emploie parfois (voire même souvent selon les lieux) des gens sans qualification pour s’occuper des enfants pendant le périscolaire ou les vacances (c’est même parfois la cuisinière qui fait l’aide aux devoirs !!) ».Franchement, à ce moment-là, j’ai compris que je ne pouvais pas faire confiance à ce reportage. Et je ne suis pas au bout de mes peines !!2 – L’arrivée à Fresh Népal :Je pense que comme pour tout occidental, l’arrivée au Népal est une grande « claque ». Les conditions de vie peuvent paraître rudimentaires mais très franchement en comparaison avec ce que j’ai vécu dans les montagnes népalaises, Fresh Népal est un 4*.En arrivant, j’ai en effet payé les 90€/semaine demandés par l’association. Très franchement, avant de partir j’ai beaucoup navigué sur internet et les prix affichés pour faire du volontariat auprès d’enfants sont souvent exorbitants ; et je ne vous parle même pas des missions d’écovolontariat où l’on te demande souvent 500€ par semaine (et encore ce n’est pas cher !!) pour agir à la préservation des animaux en voie d’extinction.Alors 90€ pour une semaine, logée et nourrie, moi je trouve que ça le fait. J’aurais dépensé bien plus en logeant et mangeant dans une guesthouse de Katmandou ! Dev m’a en contre-partie fourni un reçu de don.A aucun moment, à mon arrivée, je n’ai eu tout le « folklore » qui est montré dans le reportage. En même temps, je ne suis pas arrivée le jour du Tihar ! Et oui, c’est un des plus grands festivals au Népal, celui des enfants ! Ce jour-là, les enfants se font beaux et montrent leurs chants et danses. On fête aussi les frères et sœurs lors du Tihar. Ainsi, les journalistes ont été accueillis comme des frères au sein de Fresh Népal d’où la tikka traditionnelle… Et après on dit que les enfants ont un message bien rôdé ?? !!! Non, le journaliste est juste arrivé un jour de fête ! Ajoutez à ça la présence de la caméra et vous avez tous les ingrédients pour que les enfants fassent leur « show », mais aucunement dans le but d’enjoliver leur vie ici ; c’est juste la fête !Moi quand je suis arrivée, les enfants m’ont simplement dit bonjour au fur et à mesure que je les rencontrais lors de ma visite des locaux !! J’ai été intégrée, sans cotillons ni fioritures !!!3 – Les enfants :Je ne vois pas où il y a tromperie concernant la situation des enfants : il est clairement dit sur le site internet de l’association que les enfants sont soit orphelins, soit de familles discriminées (système des castes), soit de familles très pauvres. D’ailleurs, Dev et Dhana parlent très librement des enfants et de leurs origines. En effet, il ne s’agit pas d’un orphelinat, comme on l’entend en France, mais plutôt d’une maison d’enfants !Pour ma part, je trouvais ça intrusif et n’avais pas besoin de connaître l’histoire de chaque enfant pour agir ; donc j’avoue ne pas avoir poser beaucoup de questions. Par contre, certains enfants eux-mêmes, m’ont parlé de leur famille sans que j’aie à les questionner. C’était en effet avec de l’émotion mais comme tout enfant qui te raconte sa vie difficile !Au cours de ma dernière visite, après la diffusion du reportage (que Dev et Dhana n’ont pas vu d’ailleurs !), j’ai pu voir les documents officiels des enfants. Car oui, il y a pour chaque enfant des attestations officielles relatant leur histoire (orphelins, de parents infirmes...) ainsi que le certificat de naissance, et toute leur scolarité, le tout dans un classeur propre à chacun !Alors, il est facile de faire dire à un enfant que sa famille lui manque, les larmes aux yeux, pour apitoyer le spectateur !! Moi qui suis partie en colonie de vacances à plusieurs reprises en tant qu’animatrice, je peux vous assurer que même sur une courte durée, la rupture avec le cocon familial est difficile à vivre pour les enfants malgré le fait qu’ils passent de super vacances !!Et bien c’est la même chose ici. Bien entendu que les enfants ayant encore une famille sont tristes d’être éloignés d’elle mais ils ont aussi conscience de la chance qu’ils ont d’être accueillis à Fresh Népal, d’étudier et d’avoir un avenir plus clément que celui qui leur était prédestiné ! Et oui, car ici, au Népal, l’ascenseur social est plus qu’en panne !!J’avoue ne pas trop comprendre comment un enfant qui est soi-disant « enlevé » à sa famille peut y aller pendant les vacances et revenir après !!! J’ai vu de mes propres yeux des photos des enfants partis en vacances dans leur famille. S’ils avaient été enlevés, ils essayeraient de rester dans leur famille, non ?Quoiqu’il en soit, j’ai vécu pendant 3 semaines avec des enfants pleins de joie, en bonne santé et travailleurs. J’ai été impressionnée par leur autonomie mais aussi par leur fraternité entre eux. Après quelques jours parmi eux, on se sent réellement dans une grande famille.Je me suis souvent posée la question de l’impact des volontaires sur les enfants. N’est-il pas compliqué pour les enfants de gérer cet attachement / détachement ? Je pense aujourd’hui que les volontaires sont une bouffée d’air frais pour ces enfants. Les volontaires leur permettent une ouverture sur le monde et une amélioration de leur quotidien : nouveaux jeux, chants… En fait, je peux aujourd’hui affirmer que dans ce genre d’expérience tu reçois autant voire plus que tu ne donnes (mais, ça, ça fera l’objet d’un prochain article) !4 – Le financier :En voyant ce reportage, je me suis demandée : « qu’est-ce que Dhana et Dev ont à gagner avec cet « hypothétique » trafic d’enfants ? »Parce que moi franchement, je ne ferai pas ce qu’ils font ! Cela fait 10 ans qu’ils donnent tout ce qu’ils ont pour ces enfants. Ils vivent dans un deux pièces face à l’orphelinat. Mais pendant des années, ils ont vécu au sein de l’orphelinat en dormant dans le bureau (avec leurs 3 enfants !). Ils n’ont aucun signe de richesse apparente : pas de gros bijoux, pas de vêtements de marque… leurs enfants non plus ! Ils ne partent jamais en vacances et gèrent ces enfants, devenus grands (entre 9 et 19 ans), comme les leurs, 7 jour sur 7. Ils ont pour seul soucis le bien-être des enfants en leur offrant une éducation (dans une école privée) et même des activités extra-scolaires !!!Alors s’ils s’enrichissent, ils le cachent très bien !!!Très franchement, quand j’y suis retournée une journée, j’ai été accueillie les bras ouverts, on m’a offert 2 repas et ramené jusqu’à mon hôtel en moto ! On m’a même proposé de séjourner ici plutôt qu’à l’hôtel et ce gratuitement ! Je ne trouve pas que cela ressemble à des gens qui souhaitent s’enrichir sur le dos des volontaires (mais chacun fera son opinion…).Et puis, il y a ce comptable indépendant, qui certifie depuis 3 ans, les comptes de l’association. Ainsi que le suivi très pointilleux d’associations « donatrices » dont une française et une luxembourgeoise. Fresh Népal est donc sous contrôle !5 – L’expérience des 2 volontaires :J’avoue être encore plus écœurée quand je vois comment sont utilisés les propos de ces 2 volontaires et leurs réactions quand le journaliste leur apprend, après plusieurs minutes d’interview, qu’elles se sont faites embobinées par Fresh Népal !! Et Elise Lucet qui demande à la fin du reportage comment elles pourraient récupérer leur argent !!!Non mais sérieux ???!!! Ces 2 volontaires ont fait un travail formidable pendant leurs 3 mois à Fresh Népal. Elles ont en effet récolté pas mal de fonds (enfin 2000€, tout est relatif !!) mais il n’est aucunement fait allusion à l’utilisation de ces fonds. Car elles ont elles-mêmes pu faire profiter directement les enfants de cet argent, en leur finançant un voyage à Pokhara (trajet, logement, nourriture, visite pour 25 personnes !!!), en achetant une table de ping-pong… Donc l’argent récolté a réellement servi à améliorer le quotidien des enfants ! Ils parlent d’ailleurs régulièrement de ce voyage et jouent quotidiennement au tennis de table !6 – Méthodes journalistiques :Je trouve que cette enquête n’est vraiment pas sérieuse et ne va pas au fond des choses.Même pour l’exemple du Cambodge où il y a un doute sur la bonne distribution du riz, il est clairement dit qu’ils n’ont pas pu vérifier par eux-mêmes ! Pourquoi ne pas aller au bout des investigations ?De plus, pour Fresh Népal, les documents avancés sont datés de 2010 ! C’est un peu vieux quand même comme preuves !! La liste avec le passé des enfants a été trouvé sur le site internet d’une organisation avec qui Fresh Népal n’a aucun lien aujourd’hui. Il ne s’agit donc pas de données mensongères de la part de Fresh Népal !De plus, je trouve que le reportage fait passer les « volontaires » pour des utopistes et des naïfs Cela donne encore plus de poids à l’individualisme ambiant déjà trop présent dans nos sociétés occidentales !!Il faut aussi savoir que pour quitter Fresh Népal incognito, les deux journalistes n’ont prévenu personne et ont tout simplement disparu des écrans radar ! Dev les a appelés à plusieurs reprises, leur a envoyé des mails ; le tout sans réponse et donc sans explications ! Je trouve ça très irrespectueux et ne cautionne absolument pas ces méthodes journalistiques !Les accusions de « trafic » d’enfants sont graves et doivent être fondées sur des faits réels et prouvés mais ce n’est actuellement pas le cas. Pour une émission populaire comme l’est Envoyé Spécial, je trouve ça très limite. Non, tout n’est pas clean au Népal, loin de là, mais, selon moi, l’exemple de Fresh Népal est vraiment mal trouvé !Ce qui me met hors de moi c’est que ce genre d’accusions n’auraient jamais été faites sans preuves irréfutables pour une association française de peur d’être traînés en justice pour diffamation ; mais comme c’est le Népal, on peut tout se permettre !Alors oui, aujourd’hui je suis en colère et triste car cette émission peut avoir des conséquences désastreuses pour Fresh Népal et ces 18 enfants (que vont-ils devenir sans cette institution ?) et que des centaines de potentiels volontaires vont faire machine arrière de peur de se faire avoir.Il est bon de dénoncer des pratiques frauduleuses mais il est aussi important de montrer ce qui fonctionne !!! Aahhh ce beau pays qu’est la France… à toujours broyer du noir… à toujours montrer le négatif sans jamais valoriser le positif.Comme aujourd’hui je me sens seule, moi, touriste française, au Népal, souhaitant m’investir pour mon prochain (auprès des enfants ou d’éco-projets) ! Cette émission vient de briser en moi une part d’innocence et d’altruisme qui me fait tant avancer !!Merci à France 2 d’éteindre tant de rêves de voyage et de projets solidaires par l’instauration encore une fois de la peur !!Moi qui croyais que France Télévision était un gage de qualité, je suis aujourd’hui bien déçue de la manière dont ce sujet a été tourné. Ma méfiance envers les médias était déjà grande mais là je crois que c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase !Je continue de penser qu’un monde meilleur est possible mais ce n’est sûrement pas ce genre de reportage qui va aider les gens à y croire, bien au contraire !Alors oui, moi, je me revendique utopiste, naïve et altruiste (et tant pis pour moi si je me fais avoir) !! Et je vous assure que, d’ici quelques jours, je continuerai mon petit bonhomme de chemin à travers cette belle planète en m’investissant localement ici ou là.En attendant, à vous de vous faire votre propre opinion, je n’ai délivré ici que ma propre vérité !

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